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Gloire, puissance et déclin de la république romaine.

De tous les empires bâtis au cours de l’Antiquité, celui que maîtrise la puissante Rome est l’un des plus marquants. D’une part parce qu’il impose son autorité sur les rivages de la Méditerranée, du Nord de l’Afrique aux limites de l’Angleterre, de l’Espagne à la Turquie actuelle. D’autre part parce qu’il laisse dans la mémoire des hommes un souvenir durable. A l’époque du Moyen Age, quelques souverains ambitieux (Justinien ou Charlemagne) conservent l’espoir de restaurer l’œuvre politique des Césars d’autrefois dont ils s’imaginent être les héritiers légitimes. La longue construction des états européens tels que nous les connaissons souligne le renoncement au rêve d’universalité que les Carolingiens entretiennent au long de leur règne.

La tradition rapportée par les auteurs latins veut que Rome ait été fondée au VIII° siècle avant notre ère par le premier roi légendaire de la cité, Romulus. Les fouilles des archéologues modernes remettent en cause depuis longtemps maintenant les récits de Tite Live quand il retrace les premiers pas de la ville. Aux origines de l’histoire romaine, un site idéal : plusieurs collines dominant une plaine marécageuse qu’un large fleuve, le Tibre parcourt jusqu’à la mer. L’occupation des lieux est bien antérieure à la date que les écrivains anciens avancent lorsqu’ils s’intéressent aux débuts de la capitale impériale. Des populations de pasteurs et d’agriculteurs s’installent sur les hauteurs de la région parce qu’elles offrent un refuge salutaire au moment des crues du Tibre. La mise à jour récente des restes d’habitations sommaires, de simples huttes sans grand confort, conduit les spécialistes à penser que Rome naît de la fédération (L’union) de villages primitifs, rassemblés dans les limites de fortifications rudimentaires.

Au long des premiers chapitres de son œuvre, Tite Live s’attarde sur une période encore très incertaine de Rome : la royauté. Une succession de souverains dont l’existence est plus ou moins attestée contrôle la plaine du Tibre. En 509 avant Jésus Christ, une émeute secoue les rues de la cité et renverse le dernier successeur de Romulus, Tarquin Le Superbe (Ce qui signifie l’orgueilleux). Son départ brutal annonce la fin de la monarchie et les heures nouvelles de la République. Les historiens actuels ont bien du mal à déterminer les conditions exactes dans lesquelles se déroulent les évènements que Tite Live relate. Les lignes du célèbre écrivain font l’objet d’un examen critique des spécialistes parce qu’elles ne sont sans doute que le produit de traditions imaginées et reconstruites. Néanmoins, chacun s’accorde pour dire qu’à un moment de son passé, Rome fait le choix d’un régime républicain.

 

LA REPUBLIQUE ROMAINE : SON ORGANISATION, SON FONCTIONNEMENT.

Tarquin disparu, les Romains confient à des magistrats élus la destinée de leur ville. Comme en Grèce à la même époque un citoyen détient les pouvoirs politiques que ses parents lui ont transmis et participe légitimement au gouvernement de l’état.

La cité dispose d’une organisation sociale complexe. Les Romains participent chacun de droit à trois assemblées différentes, les Comices.

Les Comices curiates rassemblent les hommes en 3 curies (groupes). Chaque Curie correspond à l’un des grands quartiers du territoire.

Les Comices tributes associent les vingt et une tribus de Rome : il s’agit de communautés urbaines ou rurales, partageant un même passé, une même histoire, un même ancêtre mythique.

Enfin, la composition des Comices centuriates s’appuie sur le niveau de fortune de chacun. Les citoyens sont cette fois répartis en 5 classes et 193 centuries (Groupes d’électeurs). Les plus riches sont membres de la première classe et se rangent en 98 centuries. Lors des conflits, les moyens financiers dont ils disposent leur permettent de s’équiper par l’achat d’un cheval ou de la panoplie des hoplites traditionnels. Pendant les batailles, ils forment l’essentiel de la cavalerie et de l’infanterie lourde.

Les centuries et les classes suivantes sont celles des Romains plus modestes, capables au mieux de se procurer un armement léger. Durant les campagnes, ils tiennent le rôle d’éclaireurs.

Les plus démunis, ceux qui n’ont à leur disposition aucun bien (La majorité de la population), appartiennent à la dernière classe et forment à eux tous les rangs d’une seule et unique centurie.

Les citoyens sont appelés aux urnes plusieurs fois par an : les élections sont un moment fondamental de la vie politique romaine. Le choix des magistrats mobilise les esprits et les énergies. La complexité du scrutin est telle qu’il est bien difficile de s’y retrouver.

Quand vient l’heure de désigner les questeurs et les édiles, les autorités rassemblent les Comices tributes, où chacun vote en compagnie de la communauté à laquelle il appartient.

En revanche, lorsque survient le temps de pourvoir les fonctions de consul, prêteur et censeur, les magistratures les plus prestigieuses et aussi les plus recherchées, chaque votant rejoint la classe et la centurie que sa fortune lui assigne.

La première classe compte à elle seul 98 des 193 centuries de la ville, une centurie valant une voix.

Dès qu’un candidat obtient la majorité des suffrages exprimés, le scrutin s’interrompt : une vieille pratique politique veut que les plus riches votent les premiers, les membres des autres classes n’ont donc presque jamais l’occasion de se prononcer.

Les questeurs sont les magistrats chargés de la gestion des finances de l’Etat : ils prélèvent les taxes et déterminent la somme que chaque famille se doit de verser au fisc dans le cadre de l’impôt.

Les édiles maintiennent l’ordre public. Ils organisent l’approvisionnement de Rome en blé, entretiennent la voierie.

Les prêteurs sont les juges de la cité : ils président les tribunaux et jouent un rôle essentiel lors des procès.

Les consuls disposent de pouvoirs particulièrement étendus : généraux de l’armée, ils conduisent les campagnes militaires et peuvent obtenir une pleine autorité politique en cas de crise grave (Pour une période limitée néanmoins).

Les censeurs surveillent les mœurs et nomment les membres du Sénat.

Le Sénat est une institution républicaine fondamentale. Cette assemblée de 300 membres rassemble sur ses gradins les anciens consuls et les chefs des familles les plus en vue. Les sénateurs conservent pendant plusieurs siècles des attributions capitales : ils confirment les lois votées dans le cadre des Comices, adoptent des décisions parfois appliquées sans délai, décident d’une déclaration de guerre ou de la ratification d’un traité.

Le peuple participe à la gestion des affaires publique mais Rome n’est pas pour autant une démocratie dans le sens où nous l’entendons.

Les plus riches contrôlent les magistratures de l’Etat. Ce sont les patriciens, les descendants d’illustres lignées dont les ancêtres se sont souvent distingués par de glorieux faits d’armes ou une carrière politique bien remplie. Ils détiennent de vastes capitaux fonciers et en retirent tout le prestige social qui est le leur.

La plèbe réunit en revanche dans ses rangs ceux qui n’ont pas le privilège d’une brillante naissance : simples artisans, boutiquiers, paysans. Citoyens, ils participent librement aux Comices. Mais le scrutin tel qu’il est appliqué (Les plus fortunés votent les premiers) ne leur offre pas l’occasion de s’exprimer lors des grands rendez vous électoraux. Les pratiques institutionnelles ne prévoient pour eux aucun accès aux magistratures.

Cette situation ancienne conduit à de profondes inégalités violemment dénoncées. En 494 avant Jésus Christ, un groupe de plébéiens résolus se retranche sur l’une des sept collines de Rome, l’Aventin et réclame l’égalité politique entre tous. La noblesse sénatoriale oppose un refus catégorique, les mécontents menacent de créer un nouvel état. Le risque de sécession inquiète suffisamment les autorités pour que celles-ci finissent par accepter les revendications du mouvement dissident. La plèbe obtient la création de tribuns du peuple à qui l’on confie la défense des intérêts populaires. Les hommes élus à cette nouvelle fonction obtiennent vite un prestige de premier plan. Inviolables (On ne peut pas porter la main sur eux, ni les arrêter dans l’exercice de leur activité), ils peuvent s’opposer à une décision des magistrats et brandir leur veto (Un refus). Les mesures qu’ils adoptent prennent force de loi.

Les siècles suivants, les magistratures s’ouvrent peu à peu aux plébéiens. Ceux-ci peuvent enfin disposer des fonctions autrefois détenues par les patriciens. (Consuls, prêteurs...)

 

LES CONQUETES DE LA REPUBLIQUE.

La République parvient en plusieurs décennies à s’assurer du contrôle d’un immense empire dont l’autorité s’étend d’un bout à l’autre de la Méditerranée. A l’origine de l’extension romaine, un outil formidablement efficace : l’armée.

Les troupes rassemblent dans leurs rangs les citoyens dont les droits politiques (Participer aux comices) s’assortissent du devoir de défendre Rome.

Chacun pourvoit à l’achat d’un équipement personnel. Les patriciens sont capables d’assumer l’entretien coûteux d’un cheval ou d’une panoplie d’hoplite : ils servent donc dans la cavalerie et l’infanterie lourde.

En revanche, les membres de la plèbe, sans grands moyens financiers, se contentent d’un équipement plus léger. Les consuls les affectent à des postes que l’on imagine moins glorieux que ceux des plus riches : éclaireurs lors des campagnes, ils sont aussi affectés à la défense des remparts da cité.

Les légions conquièrent leur réputation d’invincibilité militaire par une succession ininterrompue de victoires. Mais les succès ont un prix : celui d’une discipline martiale sans faveur et d’une brutalité parfois effrayante. La cohésion des rangs exige les plus cruels châtiments lorsqu’un soldat se dérobe à ses obligations ou fuit devant l’ennemi. Les peines appliquées aux déserteurs sont très lourdes : bastonnade, décapitation.

Quand un bataillon entier plie sous la pression adverse et se met en mouvement de retraite sans y avoir été invité par ses supérieurs, les consuls ne montrent aucune mansuétude : les officiers qui n’ont pas su contenir la panique de leurs hommes sont exécutés. Soucieux de frapper les esprits, les généraux choisissent parmi les fantassins coupables de malheureuses victimes du hasard qu’ils font aussitôt mettre à mort pour l’exemple.

Les Romains maîtrisent parfaitement les techniques de siège. La construction de fortifications de bois autour d’une cité à prendre permet d’isoler les défenseurs des remparts et d’empêcher le ravitaillement d’éventuels secours extérieurs. Tours mobiles, béliers que les meilleurs architectes militaires savent monter en peu de temps ont raison des murs les plus solides.

Sur les champs de bataille, les armées adoptent d’ingénieux dispositifs de combat dont la rapidité d’exécution désoriente l’ennemi. Le talent stratégique de Rome est tel que les consuls sont passés maître dans la réalisation de mouvements d’encerclement qui prennent l’adversaire au dépourvu.

La République s’engage à ses débuts dans une politique extérieure très active. A la fin du V° siècle avant Jésus Christ, elle contrôle déjà les régions du Tibre : les cités rivales sont vaincues ou acceptent les traités militaires que le Sénat leur impose.

En 390, un puissant mouvement de tribus gauloises descendues de la plaine du Pô menace sérieusement le Latium. Les guerriers celtes s’avancent sur Rome et incendient une partie du Capitole. Ils finissent par se retirer en échange d’une lourde rançon. (387).

L’ambition de l’aristocratie sénatoriale est sans mesure : les légions interviennent quelques années plus tard en Italie centrale que de nombreux peuples se partagent. Parmi eux, les Samnites sont sans doute les plus résolus à mener la résistance et signent avec les états voisins une série de traités militaires défensifs. Les armées conduites par les consuls sont vaincues à plusieurs reprises. Trois longs conflits (Que l’on appelle traditionnellement les Guerres Samnites) sont nécessaires à la République pour l’emporter. (282 avant Jésus Christ).

Maîtres d’une grande partie de la péninsule, les Romains confirment leur puissance par l’organisation d’une ligue rassemblant dans ses rangs les populations soumises.

Plus au Sud, quelques colonies grecques implantées sur les littoraux méridionaux du pays, maintiennent encore leur indépendance. Tarente, la plus puissante d’entre elles, se heurte aux intérêts du Sénat. Elle appelle à son aide Pyrrhus, le roi d’Epire. Celui-ci débarque sur le sol italien accompagné d’une redoutable armée et affronte les légions. Le souverain est un remarquable stratège. Il inflige à ses adversaires une série de défaites sanglantes. Néanmoins, à l’issue de dix années de campagnes incessantes et d’un ultime désastre, il évacue la péninsule. Tarente, abandonnée, se résout à la reddition. La cité accepte de participer à la confédération latine que contrôle la République.

De l’autre côté de la mer, un vieil état du Nord de l’Afrique, Carthage, observe avec inquiétude les progrès de Rome. Solidement établie en Sicile, le grenier à blé de l’Antiquité, la cité craint que sa rivale italienne ne vienne lui disputer la maîtrise des grandes voies commerciales du bassin occidental de la Méditerranée.

L’hostilité s’installe entre les deux puissances et conduit à la première guerre punique (264-241 avant Jésus Christ). Le conflit s’éternise : les belles victoires navales romaines remportées sur l’ennemi compensent l’échec meurtrier d’une expédition en territoire punique.

L’affrontement se finit sur un ultime revers de la flotte Carthaginoise. Forte de son premier succès extérieur, Rome impose aux vaincus épuisés des conditions de paix sans concession : la République s’empare de la riche Sicile. L’île devient la première province d’un empire en construction.

La difficile victoire des légions ne règle pourtant rien. Trente ans plus tard, un ambitieux général, Hannibal reprend les armes. L’homme a été élevé dans une haine sans limite pour la cité du Latium. Quittant l’Espagne dont Carthage a fait une prospère colonie, le personnage franchit à la tête d’une redoutable armée et de quelques dizaines d’éléphants les Pyrénées puis les Alpes. Il débouche dans la plaine du Pô et bouscule à plusieurs reprises les armées du Sénat déroutées par une invasion que les autorités de la cité elle-même imaginaient improbables. La deuxième guerre punique (218-202 avant Jésus Christ) est la plus dure pour Rome. Les talents stratégiques de deux prestigieux consuls n’évitent pas le désastre sanglant de Cannes (Août 216) au cours duquel une grande partie de l’aristocratie romaine périt. Hannibal aurait pu marcher sur la plaine du Tibre laissée sans défense et en prendre facilement le contrôle. Renonçant à ce projet pourtant réaliste, il préfère occuper la péninsule et espère amener Rome à la reddition. Tragique erreur qui lui coûte finalement la victoire. Moins que jamais la République aux abois n’est décidée à déposer les armes. En quelques années, les magistrats mettent sur pied de nouvelles troupes. Les consuls travaillent à l’invasion de l’Afrique du Nord et de l’Espagne afin d’isoler le général carthaginois en Italie puis l’obliger à regagner au plus vite sa cité. La flotte romaine réussit un débarquement périlleux et s’assure de la maîtrise des côtes du territoire punique. En 202, un ultime affrontement à Zama se termine par la défaite de Carthage. La ville accepte la paix que le Sénat lui propose, Hannibal s’enfuit auprès de son allié le roi de Macédoine. Activement recherché puis découvert par ses adversaires, il préfère se donner la mort.

La République étend dès lors son pouvoir sur le bassin occidental de la Méditerranée, de l’Espagne à l’Italie en passant par la Sardaigne, la Corse, la Sicile et les littoraux du Sud de la Gaule.

La seconde guerre punique s’achève-t-elle à peine que Rome intervient en Orient. A l’origine, les craintes de Pergame, d’Athènes et de Rhodes quant aux ambitions de leur dangereuse voisine, la Macédoine. En vertu d’un traité d’amitié signé des années auparavant, les trois cités se placent sous la protection du Sénat. Une première série de campagnes (200-197) permet aux légions de l’emporter. Le souverain Philippe V renonce à installer son hégémonie sur la Grèce.

Son fils, Persée reprend à son compte la même politique. Il est à son tour défait en 168 par les deux consuls envoyés contre lui. Vaincue et humiliée, la Macédoine se résigne à l’occupation militaire que son ennemie lui impose. Le royaume devient province d’empire, les Grecs, délivrés d’un encombrant rival, acceptent l’alliance que Rome propose, la ligue achéenne. Néanmoins, les peuples de la mer Egée réalisent un peu tard que la présence romaine est en fin de compte tout aussi pénible que celle du royaume de Macédoine. En 146, une révolte menée par Corinthe ébranle les positions de la République en Orient. L’armée envoyée sur place vient à bout de la rébellion. Le siège puis la prise de Corinthe étouffe définitivement l’agitation. La Grèce perd alors son indépendance et devient la province d’Achaïe.

La même année, les légions s’emparent de Carthage à l’issue d’une troisième et dernière guerre punique (149-146). Le Sénat impose sa destruction complète. Sur les ruines fumantes de la vieille cité abattue, s’achève une rivalité séculaire. Rome fait main basse sur les plus riches territoires du Nord de l’Afrique.

Maîtresse de la Grèce et de la Macédoine, la capitale de la péninsule italienne profite de la mort du roi de Pergame pour étendre son hégémonie en Asie mineure. En souvenir des liens d’amitié qui l’unissaient à l’aristocratie sénatoriale, le souverain fait du peuple romain l’héritier de son royaume.

Les légions s’assurent du contrôle de l’actuelle Turquie mais elles se heurtent rapidement au Pont, un puissant état des rivages de la Mer Noire que conduit Mithridate. Le roi supporte bien mal le voisinage des colonies latines installées par le Sénat pour encadrer plus efficacement les territoires tombés sous sa coupe.

En 88 avant Jésus Christ, Mithridate ordonne le massacre de 80000 commerçants et négociants romains arrivés dans la région. La brutalité de l’acte rend l’affrontement inévitable. Les consuls engagés sur place éprouvent les pires difficultés à réduire leur adversaire. Trois conflits successifs sont nécessaires pour venir à bout de Mithridate. (64 avant Jésus-Christ).

Quelques années plus tard, la Gaule demeurée indépendante jusqu’alors succombe sous les coups de Jules César, un général ambitieux et très populaire. Les tribus gauloises suspendent un moment leurs querelles habituelles et se rangent derrière un chef unique, Vercingétorix, dont elles acceptent l’autorité. Malgré les efforts du jeune guerrier et le beau succès qu’il remporte à Gergovie, les légions romaines ont finalement raison de leur adversaire. A l’issue de sanglantes campagnes au cours desquelles les populations ne sont pas souvent épargnées, César obtient la soumission du pays dont il fait une province de l’empire (52 avant notre ère). Le personnage n’est pas homme à se contenter d’une seule victoire, aussi brillante soit-elle. Sa flotte traverse la Manche et débarque dans le Sud de l’Angleterre que les Romains contrôlent aisément.

Vingt ans plus tard, son neveu, Octave, conduit les armées de la République sur les bords du Nil. La prise de la fameuse Alexandrie, dans le delta du fleuve, offre à la cité du Tibre les territoires sur lesquels s’étendait naguère l’autorité des pharaons. La dernière souveraine du peuple des pyramides, Cléopâtre, préfère se donner la mort plutôt que de tomber aux mains de son vainqueur.

En 30 avant Jésus-Christ, Rome domine la plupart des rivages de la mer Méditerranée.

 

LES DERNIERES HEURES DE LA REPUBLIQUE ROMAINE.

Les conquêtes militaires de la République bouleversent l’existence des Romains. Les légions rapportent de leur long séjour en Orient un fabuleux butin de guerre : œuvres d’art, objets précieux, esclaves.... Un flot continu de richesses, que les Anciens eux- même n’avaient jamais connu auparavant, se répand à travers les rues de Rome.

L’aristocratie est la première à profiter des trésors parvenus jusqu’en Italie. Consuls, sénateurs, magistrats, généraux ambitieux accumulent de véritables fortunes : des villas somptueuses et ornées à la manière grecque ou hellénistique fleurissent dans la vallée du Tibre. Au cours des nombreuses campagnes que la cité conduit sur les rivages du bassin de la Méditerranée, les officiers, les fantassins découvrent les mœurs raffinées de civilisations anciennes. Bien que vaincu sur les champs de bataille, l’Orient impose à ses nouveaux maîtres une admiration sincère pour sa culture et ses traditions séculaires.

L’exploitation des territoires conquis intéresse également les commerçants les plus dynamiques. Beaucoup partent s’installer dans les lointaines provinces du monde romain et y font fortune. Chaque mois, des navires chargés de cargaisons précieuses traversent les mers et abordent les côtes du Latium. De leurs voyages incertains et dangereux, les négociants rapportent les produits de luxe que la société raffinée recherche à n’importe quel prix. Pour les marchands courageux et volontaires, le travail ne manque pas. Les plus astucieux accumulent en peu de temps l’équivalant de fortunes colossales. Fiers d’une réussite méritée, ils adoptent les comportements du groupe patricien auquel ils n’appartiennent pourtant pas. La plupart d’entre eux ne sont que plébéiens de naissance. Néanmoins, désirant avant tout que l’on puisse les distinguer des plus démunis, ils forment ensemble un nouvel ordre, celui des chevaliers (Parce qu’ils sont assez riches pour s’acheter un cheval).

Les guerres de la République, si elles profitent à l’aristocratie politique de Rome, provoquent aussi la ruine et la misère de milliers d’autres personnes.

Le monde paysan est de loin le plus touché. Les campagnes militaires que les légions mènent à travers la péninsule (Contre Hannibal au cours de la deuxième guerre punique, par exemple) ravagent les champs et les récoltes. La fuite de populations entières à l’approche des troupes carthaginoises interrompt les travaux agricoles et empêche les moissons. Aux limites de la famine et de la pauvreté, les citoyens les plus modestes quittent les campagnes et se rendent à Rome où ils grossissent les rangs de la plèbe urbaine.

D’autre part, l’intégration des territoires conquis à l’empire pose le difficile problème de la concurrence économique. Jusqu’à présent, l’approvisionnement de la cité en blé reposait sur le travail exclusif des petits paysans italiens à qui les édiles s’adressaient régulièrement. Le contrôle de nouvelles régions bouleverse les vieilles habitudes : les magistrats chargés du ravitaillement de la capitale ont plutôt tendance à faire venir de Sicile (Le grenier du monde méditerranéen), d’Egypte ou d’Espagne les céréales nécessaires au pain parce que ces provinces les vendent à un prix beaucoup moins élevé. Dans ces conditions, les agriculteurs de la péninsule écoulent plus difficilement leurs récoltes et abandonnent une activité devenue moins rentable. Ceux qui le peuvent se spécialisent dans des productions agricoles plus demandées (La vigne pour le vin). Les autres partent en ville à la recherche d’un emploi laborieux.

Au lendemain des conquêtes, la population de Rome entre dans une période de croissance inconnue jusqu’alors. Les légions victorieuses reviennent d’Orient, d’Afrique ou de Gaule suivies de milliers d’esclaves (Prisonniers de guerre, femmes et enfants victimes d’un siège...). Les malheureux entrent au service des familles les plus riches de la ville et accomplissent les centaines de tâches différentes qui leur sont confiées.

Des étrangers, négociants ou aventuriers, s’installent à Rome et occupent les quartiers populaires du territoire urbain. Les magistrats doivent à présent surveiller de puissantes communautés ethniques, religieuses ou culturelles qui se regroupent dans les rues de la capitale (Grecs, Juifs, Syriens, Gaulois...).

Les inégalités sociales que les victoires engendrent entretiennent un climat lourd de tensions. Les plus démunis, les exclus de la prospérité économique attendent de l’aristocratie enrichie des réformes.

D’un côté, ceux que l’on appelle les « Optimates » (En latin, "les plus grands") rassemblent dans leurs rangs les grandes familles sénatoriales traditionnelles, soucieuses de protéger leurs intérêts et peu disposées à accepter les revendications des plus modestes.

De l’autre, les « Populares » réunissent ceux qui, au contraire, estiment nécessaire l’application de mesures favorables au peuple.

Les deux partis (Bien que ce mot, au sens où nous l’entendons aujourd’hui n’appartienne pas au vocabulaire des Romains) s’affrontent sur le terrain politique, au Sénat ou lors des élections annuelles dans le cadre des Comices.

Les oppositions prennent une telle ampleur qu’elles finissent par provoquer de terribles violences. Les personnalités les plus engagées sur la scène publique adoptent la dangereuse habitude de s’entourer de partisans. Il s’agit le plus souvent d’esclaves affranchis ou d’hommes libres de naissance (En latin, on les appelle les « clients ») qui en échange d’une récompense financière apportent au maître (Le « patron ») leurs voix lors des élections aux magistratures.

Cette pratique met gravement en péril l’ordre public à travers les rues de Rome : la haine sans limite que se vouent parfois deux adversaires dresse des centaines de "clients" les uns contre les autres et conduit à de sanglants affrontements.

Entre Optimates et Populares, le désir de l’emporter devient tel que les acteurs de la vie politique en arrivent à commettre de graves entorses aux règles du jeu institutionnelles pour obtenir la victoire.

Les premiers désordres se produisent en 133 avant notre ère. Tibérius Gracchus, élu tribun de la Plèbe (Celui à qui le peuple confie la défense de ses intérêts), propose une réforme agraire en faveur des citoyens les plus pauvres. Depuis la conquête de l’Italie, la République dispose d’un important capital foncier partagé en petites exploitations agricoles que les Romains peuvent louer en contrepartie du paiement d’un loyer. Au cours des années, certains agriculteurs ont tendance à se considérer propriétaires du sol qu’ils cultivent mais qui ne leur appartient pourtant pas. Les plus astucieux récupèrent les parcelles que l’Etat laisse à l’abandon et profitent de l’occasion pour construire de vastes domaines.

Gracchus réclame une redistribution des terres pour les petits paysans. Cette mesure déchaîne l’hostilité de l’aristocratie sénatoriale peu disposée à renoncer aux immenses propriétés rurales qu’elle détient et dont elle retire l’essentiel de son prestige. Tibérius n’est pas pour autant décidé à se soumettre aux oppositions que ses projets attisent. Au mépris de toute légalité institutionnelle, il fait déposer l’un de ses collègues opposé à ses décisions (Ce qui est totalement interdit puisque personne ne peut porter la main sur un tribun). Il tente également d’obtenir sa réélection au tribunat de la plèbe, ce qui n’est pas davantage autorisé. Se faisant, le personnage commet une grave erreur parce qu’il devient aux yeux de ses adversaires un dangereux révolutionnaire dont il faut se débarrasser. L’agitation gagne les rues de Rome et dégénère en émeute. Tibérius trouve la mort au cours des affrontements, son corps est jeté dans le Tibre.

Son jeune frère, Caius, reprend la même politique dix ans plus tard. Elu tribun de la plèbe à son tour, en 123, il applique le partage agraire imaginé par son aîné. L’aristocratie sénatoriale se rassemble contre lui. Gracchus recherche les soutiens dont il a besoin. L’homme se rapproche des chevaliers (Ceux qui ne sont pas d’illustre naissance mais qui accumulent d’immenses fortunes par l’exercice d’activités commerciales). Depuis longtemps, l’ordre équestre réclame que lui soit ouvert, au même titre que les sénateurs, l’accès aux jurys de procès. Caius obtient pour ses alliés politiques qu’ils puissent siéger devant les tribunaux, en compagnie des membres de l’aristocratie traditionnelle.

A cette réforme qui ne manque pas de relancer les oppositions, succède un autre projet tout aussi novateur : celui de donner aux habitants de la péninsule italienne la citoyenneté romaine. L’intégration de milliers de nouveaux électeurs au corps civique menacerait dangereusement la stabilité du régime mais aussi les positions de ceux qui contrôlent l’entrée aux magistratures publiques.

Le tribun va trop loin. Mis hors la loi par le Sénat, Caius trouve refuge sur l’Aventin dont les troupes régulières font le siège. Se sentant définitivement perdu, il se donne la mort. (121).

La disparition du dernier des Gracchus ramène le calme. Mais celui-ci a montré la voie de l’illégalité institutionnelle. D’autres vont s’inspirer de ses pratiques.

A la fin du II° siècle avant Jésus Christ, une personnalité montante accapare le devant de la scène politique à Rome, Marius.

L’homme n’est pas issu des vieilles familles de l’aristocratie, il appartient à l’ordre équestre. Ses origines sociales plutôt modestes le conduisent donc naturellement vers les Populares où il obtient bientôt une notoriété de premier plan.

Les évènements militaires du moment servent remarquablement sa carrière. Dans les années 110, des tribus barbares descendues du Nord de la Germanie ravagent la province du Narbonnaise, en Gaule méridionale. Les légions romaines envoyées sur place sont vaincues à plusieurs reprises. La panique gagne Rome. Marius obtient le consulat à un moment très critique pour la cité. L’énergie qu’il déploie rétablit la situation.

La réorganisation de l’armée dont il se fait l’artisan permet d’accroître les effectifs militaires. Ses réformes introduisent de profonds changements au cœur de l’armée. Depuis longtemps, les citoyens romains ne montrent plus guère d’empressement à s’engager pour des campagnes longues et lointaines. Marius comprend la nécessité d’ouvrir à tous ceux qui le souhaitent l’accès des légions. Aux premiers temps de la République, Rome était défendue par une armée citoyenne. Désormais, la ville confie sa protection à des volontaires, parfois des mercenaires étrangers, recrutés par les généraux dont ils attendent récompenses et butin. Si la réforme de Marius a le mérite de s’adapter aux évolutions des mœurs, elle est aussi fort dangereuse pour le régime. Les légionnaires ne se battent plus pour une cité dont ils ne sont pas pour la plupart originaires. En revanche, ils sont prêts à suivre dans n’importe quelle aventure les officiers qui les ont engagés et qui les payent. Disposant de troupes entièrement dévouées à leur personne, les consuls découvrent le moyen d’exercer une pression efficace sur les autorités républicaines lors des crises politiques les plus graves.

Une série de succès militaires permet à Marius d’écarter le danger germain et de dégager le Narbonnaise. Le retour triomphal qu’il accomplit à Rome lui donne l’occasion de mesurer sa popularité. Il est réélu consul plusieurs années de suite, au mépris de la légalité institutionnelle.

L’un de ses lieutenants, Sylla, dissimule de moins en moins l’impatience qui le ronge. L’homme souhaite mener sa propre politique et attend son heure. Celle-ci se présente quand le roi du Pont Mithridate fait massacrer en Orient des dizaines de milliers de Romains. Le Sénat envoie sur place une légion dont il confie le commandement au jeune ambitieux qui vient d’être élu consul pour récompense de son engagement en Espagne ou en Afrique. Le choix indispose Marius : soutenu de ses partisans, le sauveur de Rome manœuvre pour renverser son collègue. L’échec est complet : prévenu du complot, Sylla marche sur la cité qu’il prend de force et franchit avec ses troupes l’enceinte urbaine. L’évènement porte un coup terrible à la République puisque les coutumes prévoyaient qu’aucun général ne pouvait passer les limites de la capitale en tenue de combat, accompagné de ses troupes. L’entorse aux institutions est inédite mais elle donne à son auteur l’occasion de chasser Marius et ses amis. La paix civile rétablie, Sylla prend la route de l’Asie Mineure où l’attend une délicate campagne contre Mithridate.

Sylla occupé en Orient, ses adversaires reviennent à Rome dont ils font le siège au cours de l’été 87, dans une atroce chaleur. La vengeance qu’ils exercent sur le parti des Optimates plonge les rues de la ville dans la terreur. Des milliers d’opposants, dont quelques dizaines de sénateurs, sont arrêtés puis exécutés. Marius reprend le pouvoir qu’il conserve jusqu’à sa mort en 86.

Quatre ans plus tard, le souverain du Pont est enfin battu, Sylla peut revenir en Italie. Son empressement est d’autant plus vif qu’il n’ignore rien de la situation politique de la cité. En 82, il débarque au Sud de la péninsule italienne puis marche sur le Latium, accompagné de ses légions. Un affreux bain de sang se prépare. Le vainqueur de Mithridate force les défenses de Rome. Les représailles sont terrifiantes. Les auteurs anciens parlent de 70000 personnes assassinées. La grande proscription que le général organise laisse dans les mémoires un souvenir odieux et tragique. Sénateurs et chevaliers qui ont soutenu la politique de Marius sont pourchassés sans pitié. A travers les rues fleurissent des listes portant le nom de ceux que l’on recherche et sur qui pèse un arrêt de mort. Afin d’achever au plus vite l’élimination des opposants, une mesure promet l’impunité entière aux meurtriers de proscrits et une part des biens de leurs victimes pour prix de l’acte commis. La plupart de ceux qui se sont compromis avec Marius périssent sous le couteau d’un tueur zélé et intéressé. La vindicte de Sylla ne semble plus devoir finir : le maitre de Rome fait réunir sur le champ de Mars 12000 de ses prisonniers et ordonne que 3000 d’entre eux soient mis à mort sans délai.

La victoire des Optimates sur le parti des Populares s’accompagne de réformes immédiates. Les tribuns de la plèbe perdent une partie des pouvoirs attachés à la fonction : pour prendre force de loi, leurs décisions doivent obtenir l’accord du Sénat. A la sortie du tribunat, ils ne peuvent plus briguer d’autres magistratures. La vieille aristocratie sénatoriale a vécu les heures les plus sombres de son histoire sous le régime de Marius. Sylla revenu, elle récupère l’influence politique perdue.

Au mépris des règles républicaines, le consul victorieux complète son œuvre par l’installation d’une dictature personnelle dont il prend la tête. Il choisit néanmoins d’abdiquer en 79 et meurt l’année suivante.

L’un de ses jeunes lieutenants, Pompée monte alors sur la scène politique. Issu de l’ordre équestre, le nouveau venu ne cache pas ses ambitions. Une série de victoires remportées en Espagne sur les derniers partisans de Marius et sur Spartacus en Italie (Un gladiateur qui conduit la révolte de milliers d’esclaves) lui offre une popularité considérable. En 70, il est élu consul avec son collègue Crassus. (En fait, aucun des deux hommes n’a le droit d’occuper la fonction : Pompée parce qu’il n’a pas effectué les magistratures inférieures, Crassus parce qu’il n’a pas respecté le délai d’attente légal d’une année que les institutions imposent à la sortie d’une charge de prêteur. Ce n’est pas la première entorse faîte aux institutions républicaines, ce n’est pas la dernière).

Les deux maîtres de Rome abolissent les mesures du dictateur défunt. Héritier d’une ancienne famille de chevaliers, Pompée n’éprouve que peu de sympathie pour l’aristocratie sénatoriale. Les tribuns de la plèbe sont rétablis dans l’intégralité de leurs pouvoirs tandis que l’ordre équestre récupère l’accès aux jurys de tribunaux que Sylla lui avait retiré.

La dégradation de la situation en Orient réclame à nouveau l’intervention des légions. Tandis que la piraterie désole les régions de la mer Egée, Mithridate reprend les armes et agite l’Asie Mineure. Pompée obtient le commandement des troupes que le Sénat envoie sur place. Une succession de campagnes victorieuses lui permet de rétablir l’autorité de la République dans la région : battu une fois encore, le souverain du Pont se donne la mort. Son royaume devient province de l’empire. Un beau succès sur mer donne aux Romains l’occasion d’en finir avec les pirates.

A Rome, la paix civile n’a pourtant jamais été aussi lointaine. Le départ de Pompée ranime les interminables querelles politiques de la cité. Optimates et Populares s’affrontent ouvertement dans les rues et entretiennent un climat de violences qui ne semble jamais devoir s’achever. Aux désordres publics s’ajoute la conspiration d’un aventurier ambitieux, Catilina. Le coup de force échoue lamentablement, le consul Cicéron écrase les partisans du conjuré. Bien que victorieuse, la République ressort de l’évènement un peu plus affaiblie.

Au cœur des troubles, un homme attend patiemment son heure, Jules César. De prestigieuse naissance, le personnage rassemble néanmoins autour de lui le parti des Populares. Lorsque Pompée revient de ses campagnes orientales, il comprend qu’il va falloir composer et lui propose de former une alliance politique avec Crassus, c’est le premier triumvirat. Pompée et Crassus obtiennent le consulat en utilisant l’appui que leur offre César, avant son départ pour la Gaule.

L’entente ne se prolonge pas au delà de quelques années. La mort de Crassus au cours d’une guerre contre les Parthes aux frontières de l’empire bouleverse l’équilibre des forces. De nouvelles violences entre Populares et Optimates ensanglantent les rues de Rome. Le rétablissement de la paix civile impose les mesures les plus énergiques : le Sénat confie à Pompée un nouveau consulat. Mais situation inédite depuis les débuts de la République, il conserve pour lui seul la fonction. Ce que les institutions interdisent avec la dernière des fermetés.

La Gaule soumise, Vercingétorix vaincu, César songe qu’il est temps de rentrer à Rome. Il se brouille avec son ancien compagnon. Le vainqueur d’Alésia ne cache plus rien de son projet : prendre la place de Pompée et s’imposer en Italie. La guerre est dès lors inévitable. César ne recule devant aucune nécessité. En 49, il entre dans la capitale en compagnie de ses légions, au mépris des traditions les plus anciennes (Le fait s’est déjà produit par le passé). Pompée et ses partisans quittent la cité et se réfugient en Grèce. A l’issue d’un conflit de trois ans, César l’emporte sur les derniers amis de son adversaire (Celui-ci est assassiné en Egypte). Fort de son succès, le vainqueur des Gaule se fait décerner le titre de consul pour une période de dix ans (Ce qui est illégal puisque la fonction est annuelle). Il rajoute à ce titre celui de tribun et confisque à son profit le pouvoir de nommer les magistrats. Jamais les institutions républicaines n’ont été à ce point bafouées. Dans les faits, César se comporte en véritable souverain.

Son ambition démesurée finit par inquiéter les sénateurs : beaucoup craignent une restauration de la monarchie. Le maître de Rome périt sous le couteau de conjurés. (44 avant Jésus Christ).

La succession du dictateur ouvre une nouvelle période de troubles civils. Deux personnalités politiques se disputent l’héritage du défunt.

D’une part Octave, son neveu. D’autre part, Marc Antoine, son lieutenant le plus fidèle. Après l’élimination des coupables qui ont fui Rome leur forfait accompli, Octave et Antoine travaillent à la formation d’un second triumvirat auquel ils associent Lépide, un officier de César. Les trois maîtres de l’empire exercent ensemble le consulat puis se partagent les territoires méditerranéens. Antoine se réserve l’Orient, Octave l’Occident et Lépide l’Afrique.

L’entente se prolonge quelques années mais les divisions ne tardent pas à ruiner une alliance politique lourde d’arrières pensées.

Antoine multiplie les maladresses. Les auteurs anciens, souvent favorables à Octave, rapportent que le consul se serait épris de la dernière souveraine d’Egypte, Cléopâtre à qui il aurait promis le partage des provinces orientales pour ses enfants. Rien n’est certain. En tous les cas, à Rome, son attitude, que l’on compare de plus en plus à celle d’un monarque hellénistique, scandalise les milieux sénatoriaux. Personne ne peut disposer à sa guise de territoires appartenant au peuple romain. Octave se saisit du prétexte pour annoncer la rupture avec son collègue. Une nouvelle guerre civile se prépare. Le neveu de César prend la route de l’Egypte accompagné de ses légions. L’affrontement entre les deux rivaux se produit à Actium, à proximité du delta du Nil. Octave emporte la décision du combat. L’année suivante, il se rend maître d’Alexandrie (30 avant notre ère). Antoine et Cléopâtre se donnent la mort pour échapper à l’humiliation suprême d’une capture.

Le vainqueur s’empare des provinces orientales et intègre l’Egypte au monde romain.

Les succès militaires de celui que l’on considère comme le maître de l’empire annoncent la fin de la République. Revenu à Rome tout auréolé de sa gloire, le brillant général s’empare des magistratures traditionnelles et de certaines attributions sénatoriales. Tout à la fois consul, tribun, censeur et grand pontife, il se réserve le droit de ratifier les traités militaires et de déclarer la guerre quand il le juge nécessaire.

En fin politique, Octave renonce à la royauté qu’il sait entacher du souvenir tragique des derniers successeurs de Romulus. Il se contente du titre princeps, c’est-à-dire le meilleur des citoyens. Dans la réalité des faits, le principat n’est pas autre chose qu’une monarchie parée des vieilles institutions républicaines.

Le nouveau régime repose sur un subtil équilibre des forces : si celui que l’on appelle désormais l’empereur (Bien qu’Octave, devenu entre temps Auguste, ne se considère pas comme tel) conserve dans sa main les magistratures d’autrefois et gouverne certaines provinces par l’intermédiaire d’un légat (Un envoyé), il doit néanmoins composer avec le Sénat. L’assemblée conserve l’administration des régions les plus anciennes de l’empire où elle envoie des représentants choisis, les proconsuls. La gestion des affaires de Rome ne relève d’ailleurs pas du souverain. Elle est confiée aux soins de consuls, de questeurs et de prêteurs, élus par les Comices centuriates traditionnelles.

Faire de l’installation du principat une révolution politique au sens où nous l’entendons est inexact. Il s’agit bien davantage d’une transformation institutionnelle.

Auguste n’introduit aucune rupture : il maintient en place les rouages essentiels de la République.

En fin de compte, le régime installé au lendemain de la chute de Tarquin le Superbe survit près de cinq cents ans. Sa longévité démontre, s’il en est besoin, sa remarquable adaptation au gouvernement de la cité-état que fût longtemps Rome.

Néanmoins, l’expansion militaire de la ville, bien qu’elle apporte d’innombrables avantages financiers, économiques et sociaux aux Romains, détruit le fragile compromis politique que les institutions ont su créer puis conserver très longtemps.

La perspective de fortunes facilement accumulées transforme la manière d’envisager les affaires de la cité. Se mettre au service de la République n’est plus un acte désintéressé comme cela pouvait l’être autrefois. Obtenir une fonction de magistrat, gravir les échelons successifs d’une carrière administrative, c’est avant tout détenir la certitude d’un enrichissement rapide. L’accès aux services de l’Etat devient l’enjeu d’affrontements d’autant plus violents que les gains convoités sont élevés.

L’aristocratie romaine confisque à son profit le contrôle de postes lucratifs. C’est donc en son sein que s’exercent les tensions les plus dangereuses. Sénateurs, magistrats issus des milieux aisés de la ville en viennent à se déchirer et considèrent le recours à l’illégalité institutionnelle comme le moyen légitime de triompher d’un adversaire encombrant.

L’installation du principat n’est pas une révolution mais c’est une nécessité. Pour clore l’époque des divisions sanglantes de l’aristocratie romaine, il fallait un homme capable de s’imposer à ses rivaux et assumer seul le gouvernement d’un empire aux dimensions inconnues jusqu’alors. Ce sera Auguste. Celui que l’on considère comme le premier souverain du monde romain construit un régime assez puissant pour durer quatre siècles.

Le règne d’Auguste est le grand tournant de l’histoire romaine. Tandis que la période républicaine s’achève sur les ultimes soubresauts des guerres civiles, la cité écrit déjà les débuts d’un nouveau chapitre...

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